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20 juin 2022 1 20 /06 /juin /2022 20:03
JEAN-LOUIS TRINTIGNANT : après le retranchement et l'humilité

 

 

 

 

Né le 11 décembre 1930 à Piolenc dans le Gard, acteur incontournable du cinéma français, célèbre en Italie, réalisateur et pilote automobile, il se découvre à l’âge de 14 ans une passion pour Jacques Prévert, Louis Aragon et Guillaume Apollinaire. Cet engouement ne le quittera pas : il connaissait 1500 poèmes par cœur. En 1949, assister à une représentation de L’avare mis en scène par Charles Dullin est une révélation ; il découvre également Shakespeare avec Jules César sous la direction de Raymond Hernatier dont il intègre quelques années plus tard la compagnie (1951) et joue dans A chacun selon sa faim de Jean Mogin et Marie Stuart de Schiller. Il abandonne ses cours de droit et s’inscrit à Paris au cours de Tania Balachova (Dullin est décédé entretemps) pour vaincre sa timidité. Parallèlement, il est élève de l’I.D.H.E.C où il apprend à devenir réalisateur ; il y rencontre Alain Cavalier.

En 1956, il fait ses débuts au cinéma sous la direction de Ralph Habib dans La loi des rues puis Club de femmes et tourne Si tous les gars du monde de Christian Jaque. La célébrité vient avec le film de Roger Vadim Et Dieu créa la femme avec Brigitte Bardot. Mais le service militaire qui lui fait passer 2 années en Allemagne (très politisé, défenseur du FLN, insoumis, il réussit à éviter de partir pour l’Algérie) entraîne un arrêt de sa carrière. A son retour, il remonte sur les planches pour incarner Hamlet mis en scène par M Jacquemont qui dirige le studio des Champs Elysées et c’est un échec. Roger Vadim le dirige de nouveau dans Les liaisons dangereuses avec Gérard Philipe et Jeanne Moreau (puis en 1963 dans Château en Suède). Aux côtés de Pierre Mondy il figure dans Austerlitz d’Abel Gance. En 1961 Georges Franju réalise Pleins feux sur l’assassin et Robert Hossein Le jeu de la vérité. L’année suivante c’est Jacques Demy avec un sketch La luxure dans Les 7 péchés capitaux. En 1962, L’Italie le découvre avec Vittorio Gassman dans Le fanfaron, un incontournable du cinéma transalpin et il joue pour Alain Cavalier dans Le combat dans l’île. De cette époque il se souvient : « Je tournais au sentiment, à la sympathie, presque malgré moi, parfois pour l’argent. J’étais inconscient. Longtemps j’ai été mauvais. Le public ne m’aimait pas. Je n’arrivais pas à faire rire. J’avais une voix triste ». Michel Drach tourne en 1965 La bonne occase et l’année suivante Safari diamants.

1966 est l’année où, à 37 ans, il acquiert une gloire internationale avec la Palme d’or remportée au festival de Cannes par Un homme une femme de Claude Lelouch avec Anouk Aimée. Le film est également récompensé de l’Oscar du meilleur film étranger et celui du meilleur scénario original. Il dit : «  Quand je croise des gens maintenant, je fais chabadabada ». Il travaille également pour Alexandre Astruc avec La longue marche, pour Serge Korber avec Le 17ème ciel (il réalise un documentaire pour la télévision en 2012 : Jean-Louis Trintignant, pourquoi je vis) et René Clément avec Paris brûle-t-il ?

Dans son importante filmographie dont il disait : «  J’ai tourné dans 130 films il me semble, ça fait au moins 100 de trop » figurent des longs métrages engagés politiquement contre le fascisme et la dictature. «  Je suis ravi de m’engager dans un film politique » révélait-il. Il mêle les films d’auteurs et ceux plus destinés au grand public. Il cultive le goût de savoir se dérouter, sortir des sentiers battus pour explorer de multiples univers de cinéastes en faisant confiance à des réalisateurs quasi-débutants. En 1965, Costa Gavras lui donne un rôle dans Compartiments tueurs aux côtés d’Yves Montand qu’il retrouve en 1969 dans Z. Un prix d’interprétation masculine lui est attribué à Cannes. En 1967, Alain- Robbe-Grillet met en scène Trans –Europ Express. Un Ours d’argent récompense à Berlin son rôle dans L’homme qui ment l’année suivante. Leur collaboration se poursuit en 1974 pour Glissements progressifs du plaisir et un an plus tard dans Le jeu avec le feu.

En 1968, il rejoint Klaus Kinski dans Le grand silence de Sergio Corbucci, un western spaghetti et Stéphane Audran dans Les biches de Claude Chabrol. Marcel Bozzufi réalise L’Américain un an plus tard. En 1970, Bernardo Bertolucci tourne ce qu’il considère comme son meilleur film Le conformiste d’après le roman d’Alberto Moravia avec Dominique Sanda. L’acteur pense qu’il y a trouvé son plus beau rôle même s’il avoue plus tard : «  Ce film je l’ai fait avec une douleur épouvantable ». Son drame sera évoqué dans un autre paragraphe. Philippe Labro conçoit Sans mobile apparent en1971 (puis La crime en 1983). En 1975 pour Gérard Pirès c’est L’agression (et, 2 ans plus tard L’ordinateur des pompes funèbres). Helvio Soto tourne en 1976 Il pleut sur Santiago et Valério Zurlini Le désert des Tartares.

De 1976 à 1978, il se retire momentanément à Lambesc près d’Aix en Provence. C’est sa première retraite. Il n’apparaît qu’en 2 occasions en 1977 pour Serge Leroy avec Les passagers et Michel Soutter pour Repérages (un travail les avait réunis en 1974 avec L’escapade). Il avait écrit à ce metteur en scène suisse pour lui dire qu’il aimerait être dans un de ses films même comme assistant ou photographe de plateau. Son retour sur le grand écran se fait avec L’argent des autres de Christian de Chalonge (puis Malevil en 1981). En 1980, il rejoint l’équipe d’Ettore Scola pour La terrasse (il tourne également Passion d’amour en 1981 et La nuit de Varennes l’année suivante). Sous la direction de Michel Deville (auteur en 1974 du Mouton enragé) c’est Eaux profondes d’après un roman de Patricia Highsmith et sous celle d’Alexandre Arcady pour un rôle secondaire dans Le grand pardon. (Dans l’opus 2 il est narrateur). Son seul doublage est celui de Jack Nicholson dans Shinning sur la seule volonté de Stanley Kubrick. Il participe, en 1983, au dernier film de François Truffaut Vivement dimanche avec Fanny Ardant. Il retrouve Claude Lelouch en 1984 pour Viva la vie, un an plus tard pour Partir, revenir et en 1986 pour la suite du film primé dans le passé à Cannes : Un homme une femme : 20 ans déjà.

En 1985, il se dit lassé du cinéma et se retire d’abord à Uzès dans le Gard puis à Collias. Il tourne pour le Suisse Alain Tanner La vallée fantôme en 1985 et pour Enki Bilal Bunker Palace Hôtel (Ils se revoient en 1996 dans Tykho Moon et en 2004 dans Immortel, ad vitam).Préférant se consacrer à d’autres activités, il apparaît beaucoup moins sur les écrans. En 1993, c’est L’instinct de l’ange de Richard Dembo. En, sur l’insistance de sa fille Marie, il tourne sous la direction de Krzysztof Krieslowski le dernier volet de 3 couleurs : Rouge et participe au 1er film de Jacques Audiard Regarde les hommes tomber (puis en 1996, Un héros très discret). En 1998 il fait une exception pour Patrice Chéreau avec Ceux qui m’aiment prendront le train. Il tourne son 1er film avec sa fille Marie en 2002 Janis et John dans une réalisation de Samuel Benchetrit, le compagnon de celle-ci.

Après 10 ans d’absence il revient au cinéma dans Amour de Michael Haneke dont le travail le fascine et qu’il considère dès lors comme le plus grand réalisateur du monde. Le film, comme les interprètes, Emmanuelle Riva est sa partenaire, reçoivent la Palme d’or. Le long métrage reçoit également un César et l’Oscar du meilleur film étranger. L’acteur est récompensé par un César et un European Award et est sacré meilleur acteur lors de la 18ème cérémonie des Lumières. Sous la direction de ce metteur en scène il joue en 2017 Happy end aux côtés d’Isabelle Huppert et Mathieu Kassovitz et vient à Cannes.

Atteint d’un cancer révélé en 2017 mais pour lequel il refuse les traitements médicaux , il accepte de tourner pour Claude Lelouch Les plus belles années d’une vie avec Anouk Aimée dans cette suite d’Un homme. Le film sort en 2019.

Il annonce les noms des espoirs masculin et féminin lors de la 46ème cérémonie de remise des César en 2021.

Durant sa carrière il a à plusieurs reprises refusé des rôles surtout quand les tournages l’obligeaient à un trop grand éloignement. «  Pourquoi aurais-je été tourner à l’étranger alors que j’avais tant de rôles en France ? » Ce fut le cas pour le journaliste dans Apocalypse now de F.Ford Coppola, de Lacombe dans Rencontres du 3ème type du film de Joseph Losey The servant. En ce qui concerne Fellini, il est agacé par les atermoiements du réalisateur qui le pressent dans Casanova. Pour Le dernier tango à Paris il dit : «  Le rôle me plaisait beaucoup mais c’était trop difficile pour moi, je n’aurais pas eu l’impudeur nécessaire… » ; de plus, sa fille Marie, 10 ans, l’en a dissuadé.

Il réalise 2 films : en 1973, Une journée bien remplie avec Jacques Dufiho, c’est un échec malgré de bonnes critiques car les genres humour noir et nonchalance sont mélangés. Même constat avec Le maître nageur en 1979 avec Jean-Claude Brialy et Guy Marchand. Il déclare : «  Je n’ai pas été à la hauteur, pas assez impudique ». Il est également auteur d’un court métrage Les yeux de Wana et compose des sujets pour Dim Dam Dom.

Outre les films, il participe à des courts métrages : en 1955, Pechiney de Marcel Ichac ; en 1986, 15 août de Nicole Garcia et en 2004 Epreuves d’artistes de Gilles Jacob avec Michel Serrault et Gérard Depardieu. A la télévision dès 1955 François Chatel le fait jouer dans L’assassin a pris le métro, puis en 1964 Lazare Iglesis dans Avatar. Michel Drach réalise un épisode de la série Le train bleu s’arrête 13 fois en 1965. Pour un oui ou pour un non est le travail de Jacques Doillon et Nathalie Sarraute en 1990 de même que Julie de Carneilhan de Ch. Frank. La controverse de Valladolid en 1992 et l’année suivante L’interdiction sont des tournages de J.D. Verhaeghe.

Sa carrière théâtrale est elle aussi importante avec des interprétations d’auteurs tels que Robert Hossein, G.B. Shaw, Eugène Ionesco, Julien Green, Tennesee Williams, Jean Giraudoux, Shakespeare, Françoise Sagan, William Gibson. En 1993, il joue dans Love letters d’A. Ramsdell Gurney, fait des lectures dans le cadre du festival d’Avignon de 1993 à 1995 puis en 2005 et 2008. Il est un interprète d’ Art de Yasmina Reza en 1996 et 1998 et fait connaître Le journal de Jules Renard.

Il est sur scène avec sa fille Marie en 2002 pour une pièce de Samuel Benchetrit Comédie sur un quai de gare. L’auteur les met en scène l’année suivante dans Poèmes à Lou. Il lui fait un hommage en 2005 avec une lecture d’Apollinaire, qu’ils avaient créée ensemble à Avigon et joue en compagnie de Roger Dumas Moins de 2. Ilcélèbre ensuite 3 poètes libertaires : Vian, Prévert et Desnos en étant accompagné au violoncelle et à l’accordéon puis avec Daniel Mille et Astor Piazzola il poursuit ses récitals poétiques dont le dernier eut lieu l’été dernier à Chateauvallon. Il avait rêvé d’un spectacle consacré aux Chants de Maldoror de Lautréamont.

Vie privée : Il rencontre Stéphane Audran au cours de Tania Balachova. Ils se marient le 18 novembre 1954 et divorcent en 1956, l’acteur ayant commencé une liaison avec Brigitte Bardot, épouse de Roger Vadim sur le tournage de Et Dieu…La romance se termine en 1957 car l’actrice a rejoint Gilbert Bécaud. Elle disait de lui : «  Effacé, profond, sérieux, calme, puissant, timide, il était tellement mieux que moi ».

En 1958, il rencontre Nadine Marquand, sœur de Serge et Christian, amis de Vadim. Ils se marient en 1961 et ont 3 enfants : Marie, née en 1962, décède le 1er août 2003 sous les coups de Bertrand Cantat. Pauline meurt à l’âge de 10 mois en 1969 à Rome lors du tournage Le conformiste. L film Ca n’arrive qu’aux autres avec Catherine Deneuve et Marcello Mastroianni en 1971 raconte cette tragédie. Vincent naît en 1973. Son épouse est monteuse ; elle devient réalisatrice et il tourne 5 films sous sa direction : Mon amour, mon amour en 1968, Le voleur de crimes en 1969, Défense de savoir en 1973, Le voyage de noces en 1976et L’été prochain en 1985. Elle est l’auteur en 1965 d’un court métrage : Fragilité : tout homme est une femme et pour la télévision en 1996 L’insoumise. Il est également récitant d’un texte de Paul Eluard dans Rêveuse jeunesse en 1994. Le temps du tournage du film de Pierre Granier-Deferre Le train il a une brève liaison avec Romy Schneider mais la quitte pour revenir vivre avec Nadine ; l’actrice est désespérée. Fin 70, sa femme le quitte pour vivre avec Alain Corneau. Le divorce est prononcé en 1976 et quand les 2 réalisateurs se marient en 1998, Alain, avec le consentement de leur père, adopte Marie et Vincent. Sur les circuits automobiles, il rencontre une pilote Marianne Hoepfner qu’il épouse en 2000.

L’automobile : Neveu des pilotes Louis et Maurice, il hérite de leur passion et court un temps comme pilote professionnel pour British Leyland. Il participe à de nombreux rallyes (6 fois celui de Monte-Carlo). Il abandonne au Mans en 1980 après avoir frôlé la mort mais termine 2ème aux 24 heures de Spa. Il est membre du Simca Racing Team (sur Simca 1000 Rallye) avec Moustache, Claude Brasseur et Guy Marchand.

Le producteur de vin : En 1996 il achète un domaine viticole de 5 hectares dans les Côtes du Rhône. 10 ans plus tard son Rouge Garance (AOC) est un des domaines les mieux notés de la vallée. «  Je passe mon temps dans les vignes, je veille aux assemblages ». Il circule à mobylette dans le vignoble.

«  Sauvage et subtil, ce stoïcien quitte la scène »(Le Figaro), il s’est éteint le 17 juin 2022 entouré de ses proches « paisiblement, de vieillesse » selon une déclaration de son épouse. Ses obsèques se dérouleront dans l’intimité. Nadine Trintignant lui rend hommage : «  C’était quelqu’un de rare, de déroutant dans le bon sens. Un immense comédien…Il a travaillé toute sa vie avec son magnétophone à la main à dire des poèmes et à la fin de sa vie, enfin les 4 dernières années, il a bouleversé tout le monde en disant des poèmes merveilleux d’une façon merveilleuse ». D’autres témoignages figurent dans la presse : «  Le plus secret des comédiens », «  Une des plus belles voix du cinéma français avec lequel il entretint un rapport distant et ambigu ». Il aimait prôner le retranchement et l’humilité : «  Etre une page blanche, partir de rien, du silence. Dès lors, on n’a pas besoin de faire de bruit pour être écouté. « Il confessait avoir raté son idéal : «  Rester un acteur clandestin ».


ET UN CINE QUIZ JL TRINTIGNANT

Certains films ont volontairement été omis. Il s’agit maintenant dans un questionnaire qui les mentionne de retrouver les partenaires féminines de Jean-Louis Trintignant à l’écran.

1. 1964. Mata-Hari, agent H21. J.L. Richard

2. 1965. Merveilleuse Angélique. Bernard Borderie

3. 1969. Ma nuit chez Maud. Eric Rohmer (prix Méliès)

4. 1970. Le voyou. Claude Lelouch

5.1972. La course du lièvre à travers les champs. René Clément

6. 1974. Les violons du bal. Michel Drach (1965 : La bonne occase)

7. 1974. Le secret. Robert Enrico (avec Ph. Noiret)

8. 1975. Flic Story. Jacques Deray (il joue Emile Buisson avec Alain Delon) (1972. Un homme est mort)

9. 1975. La femme du dimanche. Luigi Comencini

10. 1980. La banquière. Francis Girod (Le bon plaisir en 1984 dans lequel joue l’actrice suivante)

11. 1980. Je vous aime. Claude Berri

12. 1984. Femmes de personne. Christopher Frank (choix entre 3 actrices).

13. 1985. Rendez-vous. André Téchiné.

14. 1986. La femme de ma vie. Régis Warnier

15. 1991. Merci la vie. Bertrand Blier. (Pour vous aider, c’est la fille de la précédente…)


 


 

REPONSES : 1. Jeanne Moreau ; 2. Michèle Mercier ; 3. Françoise Fabian ; 4. Danièle Delorme ; 5. Léa Massari ; 6. Marie-José Nat ; 7. Marlène Jobert ; 8. Claudine Auger ; 9. Jacqueline Bisset ; 10. Romy Schneider ; 11. Catherine Deneuve ; 12. Marthe Keller, Caroline Cellier, Fanny Cottençon ; 13. Juliette Binoche ; 14. Jane Birkin ; 15. Charlotte Gainsbourg.

......................................................................................................................Claudine
 


 


 


 


 


 

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