Les Studios de Cinéma, lieux de tournage, que Georges Méliès à Montreuil nommait "Ateliers", sont des lieux mythiques de magie, parfois de drame. Ce sont d'immense surface qui occupent de très nombreux corps de métiers. La plupart peuvent être visités lorsqu'ils persistent. Avec notre guide Claudine nous vous conduisons maintenant pour en Europe de l'Ouest.
En Italie : Cinecitta
Les studios sont situés dans le quartier de Don Bosco, à 9 km du cœur de Rome sur la Via Tuscolana. Ils sont nés d’une idée de Luigi Freddi, chef directeur général du cinéma italien du gouvernement fasciste pour concurrencer Hollywood et créer un cinéma de propagande fasciste.La 1ère pierre fut posée par Benito Mussolini le 26 janvier 1936 et l’ensemble inauguré le 28 avril 1937. Sur un terrain de 600 000 m2 se dressent 73 édifices dont 16 théâtres avec loges, 4 hectares de voirie, 75 km de rues, 3,5 hectares de jardins, 2 grandes piscines, restaurant, hôtel et tous les secteurs techniques. Entre 1937 et 1943, environ 300 films y furent tournés.
Après la chute de Mussolini le 25 juillet 1943, de grands noms du cinéma italien utilisent les lieux, comme Alessandro Blassetti, Luchino Visconti, Roberto Rossellini et Vittorio de Sica, les 2 derniers étant les précurseurs du néo-réalisme. Bombardé, le site servi entre 1945 et 1947 de camps pour les personnes déplacées. En 1949, Mervyn Le Roy y tourne la 1ère version parlante de Quo Vadis, film qui sortira en 1951 car les coûts de tournage sont moins élevés qu’à Hollywood. Les studios connaissent un âge d’or dans les années 60 avec le tournage d’environ 150 péplums comme Hélène de Troie en 1956 ou Benhur en 1964. Ce seront ensuite pendant 5 ans des westerns spaghetti comme Pour une poignée de dollars de Sergio Léone en 1964.
Federico Fellini fut un occupant très assidu durant 20 ans : La dolce vita en 1960, Huit et demi en1963, Fellini Roma en 1972, E la nave va en 1993. Il réalise en 1987 un film en hommage à cette cité du cinéma : Intervista.
En 1991, le concours de musique de l’Eurovision s’y déroule.Dans la nuit du 9 au 10 août 2007, un incendie ravage près de 40 000m2 du complexe. L’intervention rapide et efficace des pompiers permet de sauver des décors historiques comme ceux de Benhur. Maintenant ce sont aussi des séries destinées à la télévision qui y sont tournées : la saison 6 de Kaamelott d’Alexandre Astier, The youg pope (2016) et The new pope(2019) avec reconstitution de la chapelle Sixtine et d’une partie de la basilique Saint-Pierre.
Le lieu, très accessible par le métro ou le bus, peut se visiter depuis 2011. Il est ouvert tous les jours sauf les 24 et 25 décembre et lors des tournages. Il en coûte 15 euros pour un adulte.
En Allemagne :
Babelsberg ( au sud- ouest de Berlin, dans le Brandebourg)
En 1911, le photographe Guido Seeber achète une ancienne fabrique de fleurs artificielles d’une superficie de 47 hectares. En 1912, le premier film en lumière naturelle y est tourné dans une serre : Der Tontentanz, avec Asta Nielsen, une actrice danoise .En 1920 ce sera le golem de Paul Wegener et en 1922 Nosferatu le vampire de Murnau. Pour le tournage de Metropolis, Fritz Lang obtient un plateau de 2 200 m2. En 1921, le site est rénové par la UFA pour l’arrivée du parlant. L’isolation d’une très grande qualité est obtenue par la construction dans chaque bâtiment d’un second bâtiment. En 1930 y sera tourné L’ange bleu de Joseph von Sternberg, et des films de Jean Grémillon, Gueule d’Amour avec Jean Gabin et Monsieur Victor avec Raimu.
Durant le 3ème Reich, Billy Wilder et Fritz Lang émigrent aux USA et Goebbels dirige les studios auxquels il adjoint une école de réalisateurs : » Deutsche Filmakademie Babelsberg « pour former des techniciens correspondant à l’idéal national socialiste. Etre syndiqué à la Chambre du film du Reich (Reichsfilmkamme) est obligatoire. Un prix à l’image des Oscars américains est créé : Deutscher Filmpreis. Environ 1100 films ont été tournés même quand la ville de Berlin fut bombardée.
Après 1945, sous l’orbite communiste, création de la DEFA, avec une vague de films antifascistes comme Les assassins sont parmi nous de Wolfgang Staudte. La liberté de création est surveillée et la production s’articule autour de films en costumes ou d’histoires pour enfants comme Les aventures de Till l’espiègle avec Gérard Philippe en 1956, Les sorcières de Salem de Raymond Rouleau en 1957 ou encore Les Misérables de Jean- Paul Le Chanois en 1958.
Les studios connaissent une période un peu difficile durant la réunification et le nombre des employés chute de 24 400 à 792. Rachetés en 1992 par la Compagnie Générales des Eaux, ils hébergent une des 2 grandes télévisions régionales et accueillent des visites touristiques. En 1993, transformation en parc- média ( Film Park) dont la visite dure ente 5 et 6 heures et tournages car le coût en environ 10 % moins élevé qu’à Hollywood et la ville de Berlin toute proche peut être utilisée pour les décors naturels. Ce seront par exemple : Stalingrad de Jean-Jacques Annaud, Monuments men de Georges Clooney ou encore Le pianiste de Roman Polanski.
En Angleterre :
Plusieurs lieux peuvent être mentionnés.
Pinewood studios : dans le village d’ Iver Heath dans le Buckinghamshire, près de Londres. En 1934, Charles Boot y achète aux enchères un terrain dans une pinède et cet ensemble est racheté en 1935 par la British National Film Company. En 1935, J.Arthur Rank( ce nom reviendra pour les autres studios transforme le lieu en studios inaugurés le 30 septembre 1936 et un premier film est tourné. La Rank Organisation rachète en 1939 les Denham films, situés à environ 6 km du lieu et fondés en 1936 par le célèbre metteur en scène Alexandre Korda et où fut tourné la même année le premier film britannique en technicolor : Wings for the morning. En 1942, les studios abritent la Army Film and Photographic Unit où travaille sir Richard Attenborough. En 1984, un incendie ravage le plateau 7 et détruit les décors de la forêt du film Legend de Britley Scott. Il sera réhabilité en 1985 et porte le nom d’Albert R. Broccoli 007 en hommage au producteur des films avec James Bond tournés dans ces lieux. Le plateau d’une longueur de 102 m et d’une largeur de 41 m a vu la reconstitution du super-pétrolier Liparus dans l’espion qui m’aimait.Y furent également tournés en 1989 Batman , en 1992 Batman, le défi, Pirate des Caraïbes, Harry Potter ou encore le Da Vinci Code et des épisodes de la saga Star Wars puisqu’en 2013 le lieu devient l’adresse d’une filiale de Lucas Films. En octobre 2012, Walt Disney annonce y installer un studio permanent et signe, en 2017, un contrat de production jusqu’en 2029( quid du Brexit ?). Dans ces studios fut enregistrée l’émission anglaise The weakest link, équivalent du Maillon faible. Ils servirent de cadre à des productions télévisées comme Amicalement vôtre ou Chapeau melon et bottes de cuir. Le clip de l’album du groupe Queen The miracle y vit le jour.
Ealing : Dès 1902, Will Baker y construit un studio tout en verre sur 3 étages et ce lieu devient en 1929 le premier studio conçu pour le parlant. En 1938, avec le soutien financier de Rank, c’est un studio et une compagnie de production. De 1947 à 1955 y sont tournées ce que l’on nomme les « Ealing Comedies », une quinzaine de films souvent avec l’acteur ALEC Guiness. La BBc qui rachète le lieu y installe entre 1955 et 1995 son Department, puis le vendra à la National Film and Television School.
Elstree : situé à 20 minutes de Londres à Borehammwood Elstree fut , en 1914, le premier studio entièrement étanche à la lumière. Durant la première guerre mondiale, il ferme jusqu’en 1917. Un Ecossais, John Maxwell, le rahète en 1927 et fonde BIP ( British International Pictures). Il fait signer un contrat de 3 ans à Alfred Hitchckock qui y tourne Blackmail, le 1er film parlant anglais en 1929. Rank rachète le studio entre 1935 et 1937 puis, après la guerre la Warner et la MGM y prennent des parts. Les frères Danziger y fondent en 1952 leur propre studio et cette activité occupe jusqu’en 1965 200 employés répartis sur 5 plateaux. U n promoteur qui a racheté l’endroit en 1985 le découpe malgré l’opposition des habitants. Les autorités locales parviennent à le racheter en 1996. Des séries Tv et des tournages s’y poursuivent, comme en 2010 the King’s speech.
Gainsborough : En 1924, Michael Bacon crée les Gainsborough Pictures sur le site d’Islington, une station électrique pour les trains transformée en studios par les Américains. Il est en partenariat avec la UFA jusqu’en 1934. Alfred Hitchkock y fait ses premières armes. Il y tourne en 1935 : Les 39 marches puis Bacon part aux USA et un accord est passé avec Rank. Les tournages sont délocalisés sur Pinewood et ce sont les « Gainsborough Melodrama », drames historiques avec des stars sous contrat comme James Mason ou Stewart Granger. Le public se lasse du genre après quelques années et le site ferme en 1950.
Claudine
