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17 mai 2020 7 17 /05 /mai /2020 17:45

Aurait-il aimé qu'on fête ses cent ans celui qui a fait ses valoches et s'est barré sans crier gare, le virtuose de la gouaille, le Shakespeare de l'Argot, celui qui nous a fait marrer par sa causerie malgré les maccab', qui a su donner de l'ambiance, de la fantaisie au roman noir et des lettres de noblesse au parler populo ? Peut-être mais à condition de souffler les bougies autour d'un zinc devant des p'tits blancs secs dans l'arrière-boutique d'un bouge de Saint Ouen ou de Pigalle et à condition de pas avoir trop de mollesse dans les guiboles et le cigare encore fumant, d'être avec ses potes Bernard, Lino, Jean-Paul, Francis et quelques nénettes qui s'tiennent encore pour leur âge... Enfin, il est plus là pour jacter, mais si les paroles s'envolent, la scribouille demeure. Alors merci pour ces bons moments qui nous ont fait nous bidonner et qu'on apprécie encore.

Bravo monsieur Audiard, on pensera à vous longtemps...longtemps...longtemps...                  HM

 

Hommage à MICHEL AUDIARD 

Dialoguiste, scénariste, réalisateur, écrivain et chroniqueur de presse, il aurait eu 100 ans le 15 mai 2020...

La réalisatrice Lorraine Lévy dit : "Avec Prévert et Jeanson, ils sont la Sainte-Trinité des auteurs. Mais Audiard a laissé une empreinte encore plus forte en mêlant poésie, burlesque et brillance d’esprit."

Né le 15 mai 1920 rue Brézin à Paris XIVème où une place porte son nom, Michel Audiard a été élevé par son parrain dans un milieu modeste. Il obtient un CAP de soudeur à l’arc tout en se forgeant une solide culture ; il lira toute sa vie à un rythme soutenu. Sous l’occupation, il écrit dans plusieurs hebdomadaires collaborationnistes.  Il a nié  à 2 reprises, en 1947 et 1978, avoir eu une fiche d’adhésion au groupe Collaboration, mentionnant que cela avait été fait à son insu. Il deviendra membre du réseau de Résistance Navarre dès septembre 1943.

Il épousera le 3 mai 1947 Marie-Christine Guibert et ils auront 2 fils : François, né en 1949 et décédé en 1975 après un accident de voiture et Jacques, né en1952, scénariste et réalisateur. Un autre garçon, non reconnu, né en 1953, écrit en 2004 un livre : Être le fils de Michel Audiard.

Après la guerre, il devient livreur de journaux, ce qu’il appelle le journalisme actif. Puis il entre à l’Etoile du soir , journalisme passif . Mais la série d’ articles sur l’Asie, et un entretien que lui aurait accordé le leader nationaliste Tchang Kaï Chek, sont écrits au café. Il est remercié lorsque la vérité est découverte.

Passionné de vélo, mais ne pouvant faire carrière car incapable de monter les côtes, il rencontre un autre adepte de la petite reine, André Pousse qui l’introduit dans le milieu du cinéma,  déjà abordé en découvrant les dialogues de Jacques Prévert et d’Henri Jeanson. Il devient critique de cinéma pour Ciné-vie et déclare plus tard : «  Je n’allais jamais voir les films pour ne pas me laisser influencer. »

En 1949, André Hunnebelle lui commande le scénario de Mission à Tanger puis l’adaptation de 2 de ses romans : Méfiez-vous des blondes en 1950 et Massacre en dentelles en 1951 et celle des Trois mousquetaires en 1953. Ce sera le départ d’une carrière hors-norme jalonnée de plus de 100 films. Il adapte pour Jean Boyer Garou-Garou, le passe-muraille en 1951. Cette année-là, il sera le dernier dialoguiste de Louis Jouvet.

En 1955, il rencontre Jean Gabin par l’intermédiaire de Gilles Grangier avec lequel il avait travaillé sur Poisson d’avril en 1953. La collaboration entre l’acteur et le dialoguiste dure 7 ans et conduit à la sortie de 17 films : Les vieux de la vieille en 1960, puis pour Jean Delannoy, Le baron de l’écluse en 1960 et pour Henri Verneuil, Le président en 1961 et Un singe en hiver en 1962.

Il n’est pas aimé de la «  nouvelle vague » qu’il qualifiait de « plus vague que nouvelle » et qui lui reproche de faire » du cinéma de papa » . Mais il remplit les salles alors que « le cinéma de fiston », comme il le disait, les vide. Il écrit pour Jean-Paul Belmondo, Lino Ventura, Francis Blanche, Bernard Blier. En 1967, après une courte période de brouille, il retrouve Jean Gabin pour Le Pacha.

En 1968, il passe à la réalisation avec des films dont les titres sont les plus longs du cinéma : succès commercial pour Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages ; en 1969 : Une veuve en or,  dans lequel il joue, et Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, elle cause , en 1970 : Le cri du cormoran le soir au-dessus des jonques , en 1971 : Le drapeau noir flotte sur la marmite , en 1972 : Elle cause plus, elle flingue , en 1974 : Comment réussir quand on est con et pleurnichard avec lequel il obtient avec Jean Carmet le prix de l’humour cinématographique, prix Georges Courteline. La même année il tourne un documentaire satirique : Vive la France, où il est la voix of et Bons baisers….à lundi.

Après ces 8 films et le documentaire, il revient au dialogue et au scénario. Son fils François meurt en 1975 et dès lors son œuvre devient plus sombre à l’exemple de Garde à vue de Claude Miller pour lequel il obtient le César du meilleur dialogue en 1982 ou de Mortelle randonnée en 1983. Il participe en même temps à de grands succès du cinéma : Georges Lautner , Flic ou voyou en 1979 totalise 3 950 691 entrées , en 1981, Le professionnel : 5 243 511 et en 1983, Le marginal de Jacques Deray : 4 956 822.

En 1976, il est fait chevalier de la Légion d’Honneur et les insignes lui sont remis par Jean Gabin.

Son roman , paru en1978, un peu autobiographique, La nuit, le jour et toutes les autres nuits, qui reçoit le prix des 4 jurys, révèle l’influence qu’exerce sur lui l’écrivain Louis-Ferdinand Céline. Il conçoit de nombreux et vains projets d’adaptation de ses romans, dont un avec Jean- Luc Godard.

Un autre projet, abandonné à la suite de l’assassinat du producteur Gérard Lebovici, était d’adapter avec Patrick Modiano le livre de Jacques Mesrine , L’instinct de la mort dont Philippe Labro devait assurer la réalisation. Le prix Nobel de littérature écrivait : «  J’ai aimé Audiard. Pas seulement le dialoguiste du cinéma français, mais l’homme secret et délicat que j’ai eu la chance de connaître à l’occasion d’un scénario. Nous avions été engagés tous les deux, lui en qualité de dialoguiste, et moi sans savoir très bien en quoi consistait mon rôle. »

Il est l’auteur d’autres livres que ceux déjà cités :Ne nous fâchons pas en 1966 , Le terminus des prétentieux en 1968 , Mon petit livre rouge en 1969 , Le p’tit cheval de retour en 1975, où il décrit son exode à bicyclette, Répète un peu ce que tu viens de dire, et en 1977 : le chant du départ.

Quelques titres extraits de sa longue filmographie : L’homme de ma vie de Guy Lefranc en 1951, Les dents longues de Daniel Gélin en 1953, Un taxi pour Tobrouk de Denis de la Patellière en 1961, Les égouts du paradis de José Giovanni en 1979, La fabuleuse histoire de Roland Garros de Charles Gérard en 1979, Le grand escogriffe de Claude Pinoteau en 1976, L’animal de Claude Zidi en 1977, Espion, lève-toi en 1982 et Canicule en 1984 d’Yves Boisset.

Il travaille également avec Henri Verneuil : Les lions sont lâchés , 1961 ; Mélodie en sous-sol,1963 , qui obtient l’Edgar du meilleur film étranger ; 100 000 dollars au soleil,1964 ; Le corps de mon ennemi, 1976.

Avec Philippe de Broca ce seront : L’incorrigible en 1975, Tendre poulet et sa suite : On a volé la cuisse de Jupiter en 1980 et Le cavaleur en 1978 ;

Il a collaboré aux films de Georges Lautner : la première fois ce fut pour Les tontons flingueurs en 1963, mais les deux hommes avaient déjà eu l’occasion de travailler ensemble pour Courte tête en 1956 où Lautner était 1er assistant. Suivront : en 1964 : Des pissenlits par la racine , Les Barbouzes , en 1966 : Ne nous fâchons pas , en 1967  La grande sauterelle et Fleur d’oseille, en 1977 : Mort d’un pourri, en 1979 : Le guignolo.

Michel Audiard s’éteint dans sa maison de Dourdan le 28 juillet 1985 des suites d’un cancer et est inhumé au cimetière de Montrouge. Son petit- fils Marcel, le fils de François, publie en 2017 : Le cri du corps mourant , avec un clin d’œil au film de son grand- père.

2 films sortiront à titre posthume : On ne meurt que 2 fois de Jacques Deray et La cage aux folles 3 de Georges Lautner.

 

Pour terminer, voici un florilège de quelques répliques répertoriées par Philippe Durant (Le petit Audiard illustré par l’exemple- Editions nouveau monde- novembre 2011).

«  La vérité n’est jamais amusante. Sans cela tout le monde la dirait. » ( Les Barbouzes)

« Plus j’étais aimable, plus il se méfiait. Je lui aurais donné la clé du coffre, il se serait imaginé qu’il y avait une bombe dedans. Décidément la bêtise est un placement de père de famille. » (Les grandes familles. Denis de la Patellière, 1958)

«  On est gouverné par des lascards qui fixnt le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis. »(Le président)

«  N’oublie pas ce qu’a dit le médecin : 5 gouttes. La posologie ça s’appelle. Et de la posologie au veuvage, c’est une question de gouttes. » ( Archimède le clochard ; Gilles Grangier, 1958)

« Un intellectuel assis va moins loin qu’un con qui marche. » « Il vaut mieux s’en aller la tête basse que les pieds devant ». «  En langage clinique on appelle ça un paranoïaque, en langage militaire un brigadier. »( Un taxi pour Tobrouk)

«  La danse, c’est du pelotage. Tout ce qu’on fait avec les pieds est parfaitement secondaire. Tout le monde s’en fout. »( Les lions sont lâchés)

«  Je ne joue pas, Martinaud. Le but de mes questions c’est pas de vous faire gagner un paquet de lessive ou un voyage sur Air Inter mais de vous boucler pour le restant de vos jours. » (L.Ventura : Garde à vue de Claude Miller -1981)

«  Les seuls papiers qui m’intéressent sont ceux de l’Imprimerie nationale, avec la tronche de Blaise dans le coin. » ( J.P Belmondo : Flic ou voyou de Georges Lautner -1978)

«  Mais le Mexicain, ça a été une épée, un cador. Moi je suis objectif on parlera encore de lui dans 100 ans. » (B.Blier : Les tontons flingueurs de G.Lautner- 1963)

« C’est le Belphégor des hippodromes, Léonard. Voilà des années qu’il prend du 40 contre un et qu’il étouffe la mise. » (Michel Constantin : Ne nous fâchons pas de G.Lautner-1965)

«  Le mariage c’est le Biribi des amours. » ( M. Serrault : Carambolages de Marcel Bluwal-1962) NDLR: Pire que le bagne, que la Légion étrangère, le Biribi signifiait l’enfer pour celui qui portait l’uniforme.

«  Mais nom de Dieu de bordel ! Je vous offre des rivières tricolores, des montagnes de fleurs, des temples sacrés et vous me transformez tout ça en maison de passe, vous plantez votre Babylone normande dans la mer de Chine. » ( J.Gabin : Un singe en hiver de Henri Verneuil- 1962)

«  Les financiers d’autrefois achetaient des mines à Djelitzer ou à Zoa. Ceux d’aujourd’hui ont compris qu’il valait mieux régner à Matignon que dans l’Oubangui , et que fabriquer un député coûtait moins cher que de dédommager un roi nègre. »( J.Gabin : Le président de H.Verneuil-1960)

«  Pas d’impair, du tact. Je l’ai pas levée n’importe où. » «  Pourquoi ? Tu vas plus au Balajo ? » (F rank Villard et Bernard Blier : Le cave se rebiffe de Gilles Grangier-1961)  NDLR: Le Balajo se situait au 9, rue de Lappe ; le succès aidant une nouvelle clientèle- autre que les apaches et les voyous-y vint : B.B, S.Loren, E.Piaf, Rita Hayworth. Sa décoration provoqua l’admiration de LF Céline, écrivain préféré d’Audiard.

«  Ta pauvre Madame La Fleur, comme tu dis, s’est pas gelée les pinceaux 10 ans rue des Vertus pour s’entendre balancer des vannes. Le pucelage de Madame La Fleur, ya longtemps qu’il est à la BNCI ». (banque)( Dany Carrel : Un idiot à Paris de Serge Korber :1966)

«  50 briques, moi, je les attendrais à 4 pattes dans la neige. J’irais les chercher dans le charbon, dans le cambouis, dans la merde. Seulement j’ai été formé par une génération qui avait le respect de l’oseille. » ( Roger Hanin : Gas Oil de Gilles Grangier- 1955)

«  Moi une dame oserait me faire ce que t’a fait Gertrude, je la bute aussi sec. »( Ch. Aznavour : La métamorphose des cloportes de Pierre Granier- Deferre-1965)

«  Un officier qui n’aime pas la castagne c’est un escroc» ( German Cobos : Un taxi pour Tobrouk de Denys de la Patellière -1960)

« Ne me parle pas comme à un gâteux. Les jambes fonctionnent mais le cigare fonctionne. »( Michel Simon : Le bateau d’Emile de D.de la Patelière -1961)

«  Il est quand même mort à Cayenne lui aussi, l’oncle Adrien. » « C’est possible, mais il tenait l’harmonium à la chapelle du pénitencier. Je me suis même laissé dire que sur la fin, il composait des cantates. » ( Marlène Jobert et Françoise Rosay : Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages de M.Audiard- 1967)

«  Ma chère, étant donné votre degré d’instruction, que vous preniez Caracas pour la capitale du Brésil passe encore. Mais il est alarmant qu’à votre âge vous confondiez une hacienda avec un claque. » ( J.Gabin : Le drapeau noir flotte sur la marmite de M.Audiard-1971)

«  A partir d’un certain chiffre, on vit à croum (à crédit), on ne paie plus, on signe. »(B.Blier : Bons baisers…à lundi de M.Audiard- 1974)

«  Parce que se faire entôler c’est le nirvana, c’est l’Olympe. » ( J.C. Brialy : La chasse à l’homme de Edouard Molinaro- 1964)

« Meccaci déteste les camés et déteste les fiotes. Ca lui fait au moins 2 raisons de me chercher. » (Michel Robin : Le marginal de Jacques Deray-1983)

«  Vous êtes en pleine gourance, Monsieur l’inspecteur.» «  Si vous saviez le nombre de fois que j’ai entendu ça… » ( M.Serrault et P.Noiret : Pile ou face de Robert Enrico-1980)

«  Tu penses pas que pour 14 briques, j’allais faire de la gratte. »( Raymond Pellegrin : Jusqu’au dernier de Pierre Billon-1956)

«  Qu’avez-vous fait de votre jactance, de vos effets de théâtre ? Vous ne vous en servez plus ? Ce serait pourtant le moment ! » ( J.Gabin : Maigret et l’affaire Saint-Fiacre de Jean Delannoy-1959)

«  Ya quand même de bons moments dans ce métier. Ah c’te marrade, j’ai failli mourir ; »( Jean Richard : Sale temps pour les mouches de Guy Lefranc-1966)

«  Pas de ma faute à moi s’il y a tant d’orphelines en France, avec toutes ces guerres qui nous sont tombées sur le paletot. »( Henri Vidal : Pourquoi viens-tu si tard ? de Henri Decoin-1958)

«  J’ai pas pu prendre le métro ; Je suis rentrée à pinces avec les valoches. »( Annie Girardot : Elle boit pas ,elle fume pas, elle drague pas, mais …elle cause ! de M.Audiard-1969)

«  Mon Père, je vous ai engagé comme petit extra. Si la maison ne vous plaît pas, personne ne vous empêche de retourner à vos ratichonneries. » ( Fernand Gravey : Courte tête de Norbert Carbonnaux-1956)

«  Notre métier, tu vois mon petit, c’est la rigueur morale et la valeur de la monnaie : quand on commence à prendre une thune, on glisse en moins de deux sur la planche du vice. Et je le connais, moi, l’enchaînement fatal. »( Robert Hossein : La petite vertu de Serge Korber-1967)

                                                                            Claudine

 


 


 

 

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commentaires

J
Bel hommage à ce grand du cinéma, surement un des rares dialoguistes dont les français connaissent ces répliques devenues cultes.
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