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12 février 2021 5 12 /02 /février /2021 11:15
JEAN-CLAUDE CARRIERE, LE CONTEUR

Homme de cinéma en tant qu’acteur et scénariste, homme de lettres, qui s’est illustré dans tous les genres : écrivain, dramaturge, traducteur et essayiste. Il se définit avant tout comme un conteur. Son œuvre est foisonnante

Né le 17 septembre 1931 à Colombières-sur-Orle dans l’Hérault, il pratique dans son enfance le bilinguisme occitan-français. Quand il a 14 ans, sa famille vient s’installer à Montreuil-sous-Bois. Après des études au lycée Lakanal de Sceaux et à l’Ecole Normale Supérieure de Saint-Cloud, il obtient une licence de lettres et une maîtrise d’histoire mais se destine très vite à l’écriture en publiant son 1er roman Lézard en 1957. Il signe, comme d’autres, sous le pseudonyme de Benoît Becker des romans d’épouvante au Fleuve noir autour du nom de Frankenstein : La tour de.., Le pas de …, La nuit de …, Le sceau de …Ces titres sont réédités en 2017.

Il fait la connaissance de Pierre Etaix et coréalise Rupture en 1961. Le court-métrage Heureux anniversaire reçoit l’Oscar pour une réalisation dans cette catégorie. Ce sont ensuite : Le soupirant et Insomnie en 1963, Yoyo en 1965, Tant qu’on a la santé en 1966 et Le grand amour en 1969. Il travaille également avec Jacques Tati et écrit : Les vacances de Mr Hulot et Mon oncle qui sont des novélisations de films de ce dernier avec des illustrations de Pierre Etaix.

En 1964, il rencontre Luis Buñuel et leur collaboration dure 19 ans. Il déclare : «  Travailler avec Buñuel consistait à se séparer du monde, à aller dans un endroit retiré, face à face, sans ami ni femme le temps qu’il fallait, jusqu’à ce que l’on ait une 1ère version qui nous paraissait convenable du script ». Ils se séparaient ensuite pendant 2 ou 3 mois pour travailler à une seconde, une 3ème version. Ils jouent les scènes, incarnent leurs personnages (Buñuel se réservant les rôles féminins, cela pouvait déboucher sur «  des cènes ultra-comiques ». Ils s’étaient inventé un couple de spectateurs, Henri( Buñuel) et Georgette, qui « pouvaient à chaque instant sortir de la salle. Il fallait que nous les gardions » Quand l’un des 2 avait une idée il les consultait. Plusieurs fois, «  Henri » dit : « Viens, Georgette, ce film n’est pas pour nous. » Le journal d’une femme de chambre dans lequel il joue un prêtre aux côtés de Jeanne Moreau, adaptation du roman d’Octave Mirbeau, est la 1ère réalisation du metteur en scène en France. En 1967, Belle de jour est adapté du livre éponyme de Joseph Kessel. Le charme discret de la bourgeoisie (pour lequel il y a eu 5 versions ; cela a duré 2 ans), en 1972 est nominé à l’Oscar du meilleur scénario original, ce qui est très rare. Le film reçoit un British Academy Award. Il joue Priscilien dans La voie lactée en 1969. Ce sont ensuite : Le fantôme de la liberté en 1974 et Cet obscur objet du désir, d’après La femme et le pantin de Pierre Louys . Tous 2 participent, en 1972, à l’élaboration du scénario d’un film d’Ado Kyrou, avec Nathalie Delon et Elisabeth Wiener, Le moine, d’après le roman de M.G. Lewis. En 1982, ils écrivent ensemble Mon dernier soupir, entre autobiographie et théorie du cinéma par Buñuel. Il dit : «  J’ai partagé en tête à tête avec lui près de 2000 repas dans ma vie ».

En 1969, il réalise un court-métrage de 12 minutes sur un scénario coécrit avec Milos Forman et une musique de Michel Legrand : La pince à ongles avec Micheal Lonsdale et Henri Garcin ; la disparition de l’objet dans une chambre d’hôtel provoque la frayeur chez les propriétaires de l’objet capricieux. Pour le réalisateur américain il écrit le scénario de Taking off en 1971, adapte le roman épistolaire de Choderlos de Laclos, Les liaisons dangereuses qui devient Valmont en 1989 et coscénarise en 2005 Les fantômes de Goya avec Nathalie Portman et Javier Bardem.

Scénariste attitré du cinéma français, son nom est associé à de grands metteurs en scène et (ou) à des films bien connus. En 1967, il adapte pour Louis Malle le livre de Georges Darien Le voleur, cosigne le scénario de Viva Maria en 1965 et celui de Milou en mai en 1990. Pour Jacques Deray ce sont : La piscine en 1969, Borsalino l’année suivante, Un peu de soleil dans l’eau froide d’après Françoise Sagan et où il est François, Un homme est mort en 1972, Le gang en 1976 et Un papillon sur l’épaule en 1978. Il accompagne le réalisateur Volker Schlöndorff en 1979 pour Le tambour d’après Günter Grass, en 1984 pour Un amour de Swann d’après Marcel Proust et en 1996 pour Le roi des Aulnes d’après Michel Tournier ; il est l’auteur du scénario de Ulzhan, présenté à Cannes en 2007 avec Philippe Torreton.

Il collabore également avec d’autres metteurs en scène. Christian de Chalonge, en 1971, pour L’alliance où il joue également le rôle d’Hughes. 1974 : France, société anonyme d’Alain Corneau ; 1975 : La chair de l’orchidée, d’après James Hadley Chase de Patrice Chéreau. Dans Julie pot de colle de Philippe de Broca il interprète aussi le conseiller. 1980 : Sauve qui peut la vie de Jean-Luc Godard.

Il est récompensé par un César du meilleur scénario original pour Le retour de Martin Guerre de Daniel Vigne en 1982. Andrezj Wajda réalise en 1983 Danton puis en 1988 Les possédés d’après Dostoïevski. La même année, Peter Brook porte à l’écran La tragédie de Carmen, d’après Prosper Mérimée et Bizet, spectacle présenté au théâtre en 1981 et repris en 1997. L’unique de Jérôme Diamant-Berger date de 1986. Philip Kaufman réalise en 1988 L’insoutenable légèreté de l’être d’après Milan Kundera, film nominé aux Oscars et qui obtient le British Award Academy Film Award du meilleur scénario. L’auteur reçoit cette année-là le prix Jean-Le Duc pour l’ensemble de son œuvre. Pour Jean-Paul Rappeneau, en 1990, il adapte Cyrano de Bergerac d’après Edmond Rostand et en 1995 pour Un hussard sur le toit d’après Jean Giono. Il travaille également avec Michael Haneke pour Le ruban blanc en 2009, avec Philippe Garrel pour L’ombre des femmes en 2015 puis, et c’est son dernier dialogue, Le sel des larmes en 2019.

Déjà précédemment mentionné comme acteur dans plusieurs films, on peut le voir au générique de : Sérieux comme le plaisir de Robert Benayoun en 1975 ; Le jardin des supplices de Christian Gion et Le jeu du solitaire de Jean-François Adam en 1976 ; Photo-souvenir d4edmond Séchan en 1978 ; L’associé de René Gainville en 1979 ; L’homme de la nuit de Juan Luis Buñuel en 1983 ; Jaya, la fille du Gange de Vijay Singh en 1998 ; Bubuel et la table du roi Salomon de Carlos Saura en 2001 ; Avida de B.Delépine et G.Kervern en 2006 et Copie conforme d’Abbas Kisarostami en 2010.

Cette activité reliée au monde du cinéma lui vaut quelques récompenses : en 2009, c’est le prix Ulysse pour l’ensemble de son œuvre, couronnée elle aussi en 2014 par le prix Henri Langlois et le grand prix SACD. En 2015, il reçoit un Oscar d’honneur aux Governors Awards. En 2008, il est invité d’honneur au festival Paris Cinéma et reçoit un hommage en 2011 au festival international du film de La Rochelle.

Pour la télévision, il apporte son concours à Yannick Andreï pour La double vie de Théophraste Longuet d’après Gaston Leroux (où il joue également Eliphas de la Nox). Jacques Deray réalise Credo en 1983 puis Clarissa d’après Stefan Zweig en 1998. Jean-Daniel Verhaeghe met en scène Bouvard et Pécuchet d’après Gustave Flaubert en 1989, La bataille d’Hernani en 2002, Le père Goriot d’après Honoré de Balzac en 2004 et Galilée ou l’amour de dieu en 2006.

Au théâtre, il s’illustre en tant qu’auteur : en 1968, L’aide-mémoire est joué avec Delphine Seyrig( et repris en 2014). Il écrit et assure la mise en scène du spectacle Le client en 1971. Ce sont également : La terrasse en 1997 ; Le jeune prince et la vérité en 2001 ; 30 ans à peine en 2003 ; Les mots et la chose en 2007 avec Jean-Pierre Marielle ; L’audition en 2010. Il fait également un travail d’adaptation. Il traduit la pièce de Colin Higgins, Harold et Maude qui est mise en scène en 1973 par Jean-Louis Barrault avec Madeleine Renault au théâtre Récamier et sera reprise en 1995 dans une mise en scène de Jacques Rosny avec Danielle Darrieux. Pour Peter Brook, c’est en 1974 Timon d’Athènes d’après William Shakespeare, en 1975 Les Iks de Colin Turnbull, en 1978 L’os de Birago Diop et en 1990, La tempête d’après Shakespeare reçoit le Molière de l’adaptation. En 2001, la British Academy récompense d’un Award du meilleur scénario L’Odyssée d’après Homère d’Irina Brook. En 2002 : La preuve de David Aubum. En 2015 : Anna Christie d’Eugène O’Neil.

Auteur d'une soixantaine d'ouvrages, dont on peut retenir : une anthologie : Les plus belles lettres d’amour en 1962 ; Le petit Napoléon illustré (par Pierre Etaix) en 1963 ; Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugement en 1965 ; Le livre des bizarres en 1981 ; un recueil de poèmes : Chemin faisant en 1982 (ce seront en 1988 : Limericks français). En 1985, il rend accessible le grand poème indien, Le Mahâbhârata, dans une mise en scène de Peter Brook. La controverse de Valladolid est présentée au théâtre de l’Atelier avec Jacques Weber et Lambert Wilson en 1999 ; elle est adaptée à la télévision en 1992 par Jean-Daniel Verhaeghe avec Jean-Pierre Marielle , Jean-Louis Trintignant et Jean Carmet. Il publie l’autobiographie de sa jeunesse dans l’Hérault, Le vin bourru, en 2000. Son Dictionnaire amoureux de l’Inde paraît en 2001. En 2005, Einstein s’il vous plaît. Il traduit en 2008 La cerisaie de Tchekhov, écrit La conférence des oiseaux et collabore à 68, nos années choc. En 2009 c’est le Dictionnaire amoureux du Mexique. En 2011 sort un livre disque avec environ 40 invités : Weepers Circus, n’importe où, hors du monde, qui sera repris en 2013. En 2015, son essai : Croyance : Réflexions sur cette «  certitude sans preuve » est récompensé par le prix psychologie de la Fnac.

Il a été marié à 3 reprises ; avec la peintre et actrice Augusta Bouy, qui joue dans le film de Luis Buñuel Cet obscur objet…..Leur fille Iris, productrice de films, est née en 1962. Il épouse ensuite Nicole Janin. Devenu veuf, il s’unit à Nahal Tajadod, femme de lettres iranienne. Leur fille Kiara voit le jour en 2003. Avec sa femme, il traduit Le livre de Chams de Tabriz ; ils conçoivent et adaptent pour le théâtre Chants d’amour de Roumi en 2009.

En 2000, il prend part à la fondation de la Société des amis de Victor Hugo et en 2005, avec Gérard Depardieu, Carole Bouquet et Sophie Rigon, il crée un Festival annuel à Nîmes : On réalise dans la ville. Il est devenu Commandeur de la Légion d’Honneur le 14 avril 2017. Un cinéma porte son nom à Bédarieux dans l’Hérault.

Sa fille Kiara annonce qu’il est mort « dans son sommeil » le 8 février 2021.

Il sera inhumé dans son village natal de Colombières-sur-Orbe.

Il disait : «  Sur une journée de travail, si on ne rit pas au moins 3 fois, la journée est perdue. Il ne faut pas se prendre au sérieux."

...................................................................................................................Claudine, CCL

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